1. |
Peurs Secrètes
03:28
|
|||
Sait-on qui nous sommes
Sait-on de quoi nous sommes capables
Du meilleur ou du pire, dans nos petites vies confortables
Qu’est-ce qui pousse à se remettre en question
A faire son introspection
A faire vraiment face à ses démons
Sait-on de quoi on a besoin
Non pas ce qu’on veut
Mais ce qui nous fera avancer vers demain
On confond ce qui est nécessaire et ce dont on a envie
On confond réussir dans la vie et réussir sa vie
On nous apprend à voir avec des œillères
A ignorer ce qui n’est pas « je » : chacun gère ses affaires
On nous apprend à être médiocres et à le revendiquer
A fermer notre porte, à jalouser, à convoiter
A consommer, et cela, bien plus que de raison
On se croit libre, mais on construit soi-même les murs de sa prison
On a perdu l’envie de savoir, et le goût de l’autre
On ne sait même plus être soi, alors tu pense (!), les autres
Parqués dans nos cases anonymes, difficile de se trouver
Briser la vitre, se libérer
Mais la liberté, qu’est-ce que c’est
Le fantasme d’avoir, la nécessité d’être.
Tellement de désespoir, tellement de peurs secrètes
Ressembler à des modèles imposés
Façonné selon le moule ; prédestiné
Réprimer ses rêves, ses désirs profonds
Qu’on garde ancrés au fond de soi, et qui nous rongent
Garder une contenance ; sourires de façade
Mais dans les yeux, un voile : reflet d’une vie si fade
La routine qui crée le manque d’ouverture
L’ennui qui écrase, obsédant comme une blessure
L’envie d’autre chose, la rage de savoir
La magie d’une rencontre qui donne un peu d’espoir
La joie d’un moment partagé, la chaleur
La découverte de soi
Le bonheur
|
||||
2. |
Un Bruit qui court
03:31
|
|||
Il s’immisce dans les conversations, quels que soient l’heure ou le lieu
Il est reprit à l’unisson, par les bavards et les envieux
Ceux qui pensent que, de toutes façons, y’a pas de fumée sans feu
Et qui, pour cette simple raison, jouent allègrement le jeu
Ce jeu, c’est celui du bruit qui court, qui se répand alentour
Qui s’incruste dans les banquets, comme dans les arrière-cours
Un grognement sourd, qui grossit, tel l’ouragan
Et prend sa source au milieu d’un océan de curieux et malveillants
« Dis-moi qui ! », « Dis-moi où ! », « Dis-moi quand ! »
L’histoire se raconte, mais les récits ne concordent jamais vraiment
Fondamentalement, on s’en fout, car après tout
L’essentiel est de faire la parlote, en sirotant son Fitou
Dans les bars à vins bobos, dans les troquets crados
Dans les squares, jusque dans les jardins d’enfants, on se passe le mot
Les langues se délient, et entretiennent ce phénomène
Qui provoque pêle-mêle, scandales et réactions en chaînes
Sais-tu que j’ai entendu dire que
Un ami m’a dit que
Mais moi, je sais ce que tu ne sais pas
Approche-toi, et laisse-moi te conter tout bas la sale histoire
Celle que tout le monde veut savoir
Il fera de toi un héros, un salaud sans scrupules
Fera ton éloge plus qu’il ne faut, ou te rendra ridicule
Les possibilités sont infinies, s’accumulent
Au fur et à mesure qu’elles s’additionnent, la vérité recule
Sage, celui qui ne prête pas l’oreille au bruit qui court
Qui n’écoute pas le chant des sirènes, et reste sourd
Au boucan de la rumeur qui vocifère ; son manège l’indiffère
Seule sa conscience lui dicte quoi dire, ou faire
Exposé aux rancunes, aux règlements de comptes
Tu te retrouves à la une des potins les plus immondes
Ton image prend du plomb dans l’aile en quelques secondes
Et je t’assure que, dans ces moments, y’a que ton moral qui compte
Garde la tête haute, attends que passe l’orage
Avec le temps, s’estomperont les sales bavardages
Le bruit qui court égrène son chapelet de ragots
Qui alimenteront sans peine, les commérages des badauds
|
||||
3. |
Le Brancard
05:07
|
|||
La vieille dame s’est éteinte ; on l’a trouvée chez elle
Ses voisins ont donné l’alerte
Ils n’avaient plus de nouvelles depuis plusieurs jours
Lorsque les pompiers sont entrés
Ils l’ont découverte étendue au sol, devant son évier
On recherche ses papiers d’identité : elle s’appelle Fiona Lévi
Et aux dires de ses voisins, elle n’a plus de famille
Elle a plus de 90 ans, elle vit seul depuis 50 ans
Dans cet appartement du neuvième arrondissement
Elle vit encore à ce moment là
On découvre sur son avant-bras, un tatouage
Il y a encore des gens qui ont connus ça
Cinq chiffres gravés dans sa chair
Pour qu’elle n’oublie jamais la misère, la déportation, les massacres
On fait des examens : on décèle une hémorragie cérébrale massive
Pour cette rescapée de la barbarie, l’heure est venue
Alors on lui cherche un lit pour mourir dans la dignité
Mais il est minuit passé
Aucun lit dans aucune structure d’urgences de Paris
On cherche en vain ; on craint que la vieille dame ne passe pas la nuit
Les cliniques privées la refusent
Elles sont spécialisées dans les opérations chirurgicales rentables
La charité n’est pas leur fort
Elles se foutent pas mal de savoir ce que cette vieille dame a vécu
Elle ne leur rapportera pas un dollar
Triste réalité d’un système de santé qui se dégrade
Qui se soucie plus du pognon, que des malades
Il faut agir vite, avant qu’il ne soit trop tard
Alors la vieille dame mourante va attendre sur un brancard
Attendre quoi
La fin d’une existence menée seule
Au départ prometteuse, mais souillée par l’horreur et le deuil
Autour d’elle, toute une équipe d’infirmières s’affaire
Afin qu’elle ne manque de rien, en attendant qu’un lit se libère
Les heures passent : la nuit s’achève, la matinée commence
Fiona s’accroche à la vie, du fond de son inconscience
On lui aménage un box rien que pour elle
C’est le maximum qu’on puisse faire : c’est peu mais ça en vaut la peine
Peut-être s’est-elle battue il y a 60 ans pour la création de la Sécu
Si elle voyait où elle est maintenant
Cet âpre combat mené par nos grands-parents
Afin que nous ayons le droit de nous soigner correctement
15 heures : enfin un lit est libre, mais c’est trop tard
La vieille dame vient de s’éteindre, entourée mais sur un brancard
Des histoires comme celle-ci, il y en a des centaines tous les jours
Dans ce pays qui se renie, la mémoire sous anesthésie
Il y en aura de plus en plus, vu que nos dirigeants
Ont décidé que l’hôpital devait faire de l’argent
La santé devra s’aligner sur le privé
Au menu : flexibilité, efficience, rentabilité
Tout ce charabia libéral, sans utilité ni éthique
Dont le but secret est la suppression de l’hôpital public
Pourtant, nous avons le meilleur système de santé au monde
La menace gronde au dessus de nos têtes de privilégiés insouciants
Le concept d’accès à la santé pour chacun vit ses dernières années
Voici l’ère de la propriété privée
|
||||
4. |
||||
On a coupé la moitié de mes racines à la base
Depuis je boîte, une jambe dans l’abîme, et l’autre qui s’épuise
A maintenir un équilibre plus qu’incertain
Quoi qu’on en dise,
Je sais le chemin des indécis que l’ignorance écrase
Je sais le poids des non-dits, des mensonges par omission
Je sais le vacarme du silence qui décourage les questions
Je sais la colère qu’il engendre, je connais le plus infime
Détail du chemin que borde la rivière de mes racines
Mais j’en suis bien trop loin : ce sentier est ma bordure
Et d’où je suis, je m’imagine dans ces eaux couleur azur
Je me vois quitter cette cage, pleine de mes questions dérisoires
M’en aller, sans être pour autant libre et rempli d’espoir
De mes rêves d’enfant, ce mystère a émergé
Je volerai vers lui, à bord de cet oiseau de fer
Dont les odeurs synthétiques, déjà, ramèneront en arrière
Mon pauvre petit esprit, apeuré par tant de cimetières
O temple de ma mémoire, dont les lâches gardiens ont fuis
Laissant battantes, grandes ouvertes, les portes du souvenir
D’où plus de cent-mille grenouilles, croassant en chœur dans la nuit
Viennent me hanter, me rappeler ce passé que je ne cesse de fuir
Un jour, je partirai vers cette terre de mes ancêtres
Fantasme occidental aux innombrables plages prêtes
A accueillir le stress métropolitain, et le transformer en bien-être
Tellement le temps s’arrête, au chaud du sable fin
Tellement on est bien
Comme on peut le lire dans les dépliants d’agences de voyages
Qu’il est séduisant, le joli mirage
Toi, tu y vas, tu rentres et tu tournes la page
Je reste là, la peur au ventre, avec dans la tête toutes ces images
Fantômes de la mémoire, odeurs et visages
On ne m’a légué que des souvenirs en héritage
Et moi, je m’y complais
Même si parfois, de mon hexagone natal
Mon esprit s’évade en contemplant les étoiles
Il parcoure les kilomètres et les années
Et rejoint ceux que j’ai laissés, dans les méandres de l’enfance abandonnée
Ceux que je ne reverrai jamais, et qui sont à jamais figés dans mes pensées
Comme ce pays, auquel je me suis refusé
Un jour, rassemblant tout mon courage, je partirai
Je franchirai cet océan de peurs, de doutes et de regrets
Et de ce que j’ai laissé il y a maintenant plus de vingt ans
Je ne retrouverai rien ou presque ; mais la vie ne dure qu’un instant
Alors je veux que cet instant soit intense
A l’aube de l’adolescence, j’ai vu pour la dernière fois ton soleil éclatant
Je sais que tu m’attends, que je suis le seul qui décide
Si oui ou non, je vais plonger dans la rivière de mes racines
On a coupé la moitié de mes racines à la base
Depuis je boîte, mais peu à peu le vide se comble, à ma surprise
C’est un peu vrai qu’avec le temps, la douleur s’amenuise
Mais je donnerais cher
Pour savoir comment faire pour qu’elle s’efface
|
||||
5. |
XY
02:19
|
|||
Ça s’est passé en cinq minutes, assis à la terrasse
La stupeur, puis la douleur te submergent, te dépassent
Il t’annonce qu’il te quitte, que c’était qu’une passade
Ton monde s’écroule derrière ta contenance de façade
Il ne sait pas quoi dire, il est embarrassé
Il voudrait être loin de toi, de ton regard glacé
Il t’explique à demi-mots que ses gosses et sa femme sont tout pour lui
Que s’il les perd, il perd son âme aussi
Mais toi, tu sais ce qu’il en est, de lui et de sa petite famille
Combien de fois t’a-t-il dit qu’il voulait changer de vie
Entre bobonne qui l’insupporte, ses gosses qu’il voit si peu
Ses penchants inavoués, son existence qui sonne si creux
C’en est trop : à présent le chagrin te monte aux yeux
Les larmes débordent, malgré que tu les retiennes tant que tu peux
Tu l’aimais ; tu l’aimes toujours d’ailleurs, mais il te jette
Une année d’une passion dévorante, jetée aux oubliettes
Tu restes là groggy, après qu’il soit parti
Tu te promets de ne plus jamais craquer sur un père de famille
Tu maudis ta sensibilité à fleur de peau
Selon toi, tes pleurs sonnaient comme une faiblesse, un cadeau
Puis enfin tu te lèves, tu reprends tes esprits
Relève la tête, enfonce-toi dans la chaleur de la nuit
Un nouvel amant t’attend sûrement quelque part
Quelqu’un doux et patient, qui saura te faire oublier cette histoire
Pourtant ce soir, tu n’as pas envie de sortir
Te coller sur ton oreiller, qui étouffera tes pleurs et tes soupirs
Voilà comment pour toi, s’annonce la soirée
Les semaines à venir, gâchées pour une illusion d’une année
Toi, tu es romantique : tu cherches « le grand Amour »
Sans lui, tu ne trouves pas de sens à tes nuits et tes jours
Une douce parenthèse au milieu de la violence du quotidien
Qui s’accommode si mal de la différence
Tu n’y peux rien, c’est en toi ; tu n’as même pas eu le choix
L’évidence s’est faite jour lors de tes premiers émois
Pas facile de l’accepter quand on a seize ans
De s’affirmer clairement aux yeux de tes proches
Bons citoyens bien-pensants
Au sein d’une famille à l’image bien nette
On n’admet pas l’idée qu’il y ait des mecs qui aiment les mecs
XY
|
||||
6. |
Pour un Billet de Train
04:10
|
|||
Depuis qu’il travaille à Paris, Max est obligé de prendre le train
Il quitte Auxerre tous les matins, le soir il rejoint sa famille
Il a un abonnement professionnel
Ce soir il est en retard, et il cavale pour retrouver ceux qu’il aime
Une fois arrivé à la gare, il constate avec soulagement
Que le train n’est pas encore parti
Cependant un obstacle se dresse devant lui
Symbolisé par quatre agents de la sécurité ferroviaire, qu’il croise tous les soirs
Pourtant ce soir, ils ne veulent pas le laisser monter à bord
Tant qu’il ne leur a pas présenté son titre de transport
Max fouille de manière fébrile dans son sac
Alors qu’on annonce que le train pour Auxerre est en partance immédiate
Il leur déclare en sautant dans le train
Qu’il présentera son billet à l’agent, comme il le fait tous les matins
C’est alors que les quatre molosses
Empoignent Max sans chercher à comprendre, et le font sortir de force
Il atterrit tête première sur le quai
Le front en sang il se relève, de rage il balance un crochet au premier qui se présente
C’est le geste qu’ils attendaient
Ils vont se faire un plaisir de lui faire passer l’envie de se rebeller
Pour un billet de train coincé au fond d’un sac
Il s’est retrouvé prisonnier d’une situation pour le moins opaque
Les matraques jaillissent des ceintures
Les coups pleuvent sur son crâne, et tout son corps
Il craint de succomber s’ils frappent encore
Soudain ils s’arrêtent, y’a du sang sur le béton
Le train est parti, Max est seul face à ces quatre nazillons
Pourtant rien n’est fini ; ce n’est que le début d’une longue nuit
Incrédule, Max se retrouve ne garde à vue
On lui annonce que les agents ont porté plainte
Pour « ivresse sur la voie publique, insultes et violence physique »
Il se retrouve dans une cellule sentant l’urine et l’excrément
Doit endurer les injures et les moqueries des agents
Dont ils se faisait une idée totalement différente
Ses jugements de valeurs ont basculés en moins d’une minute trente
Lui qui applaudissait la « tolérance zéro »
Ils sont vingt dans dix mètres-carré, il y a même deux marmots albanais
Complètement paumés dans cet endroit où ils n’ont pas leur place
Révolté mais honteux, Max voit la vérité en face
Pour un billet de train coincé au fond d’un sac
Il s’est retrouvé prisonnier d’une situation pour le moins opaque
Il a subit des humiliations telles qu’il n’en avait vues que dans les fictions
Au chaud dans son canapé, à la maison
Mais là, il a tout vu : les coups, la garde à vue
Le médecin, l’avocat, et le trajet menotté dans la rue
Il se sent sali, n’est presque plus un homme
A la merci de ces messieurs, protégés par leurs uniformes
Aujourd’hui tout est fini : Max est rentré chez lui
Il a retrouvé avec bonheur son épouse et ses deux filles
L’affaire a été classée « sans suite » par le procureur
Pourtant dans son esprit, colère et peur toujours demeurent
Dans ce pays démocratique, il se croyait tranquille
Il sait maintenant à quel point le statut d’homme libre est fragile
Il suffit de quelques minutes au mauvais endroit, au mauvais moment
Et l’injustice t’attend au tournant
|
||||
7. |
Au Bistrot du Commerce
04:22
|
|||
Au bistrot du commerce
On rigole, on converse de choses sans importance
C’est le quartier général d’une bande de potes, quelque part en France
On s’y retrouve dans la bonne humeur, toujours à la même heure
Celle de l’apéro, du p’tit jaune ou du gros rouge qui tâche, et coule à flot
Les verres s’enchaînent à une vitesse hallucinante
Au rythme des tournées générales : place à la détente
On trinque sans s’arrêter, bientôt les regards sont hagards
Et même les esprits les plus chagrins finissent par devenir bavards
Comme larrons en foire jusque tard le soir, dans ce décor pittoresque
Qui sent le vieux mégot, la sueur et la mauresque
Sous les regards vulgaires de pin up à la mine boudeuse
Voisines de vieilles écharpes de clubs de foot, ternes et poussiéreuses
Francis, debout derrière le zinc, remplit les verres vides
Avec régularité, il verse le précieux liquide
Qui finira dans les estomacs de ses amis, qui oublieront leurs soucis,
La smala et le turbin, juste un peu de répit
Au bistrot du commerce, on rit bêtement
En faisant toujours le même geste, à l’écœurement
« ‘ttention gosier, v’là une averse ! »
Au bistrot du commerce,
Entre compères, on peut aussi donner sa vision de la vie
Sans risquer les austères contradictions de bien-pensant quelconque
Aucune crainte à avoir, on est entre nous
On peut dire c’qu’on pense, sans s’exposer aux tabous
Ensemble, déplorer qu’en France, aujourd’hui, tout est permis
Que l’absence d’intransigeance ouvre la porte à tous les compromis
Regarde-moi ces bicots qui font comme s’ils étaient chez eux
Si on renvoyait toute cette racaille d’où elle vient, on vivrait mieux
Approbation générale devant cette affirmation pleine de bon sens
Les esprits sont échauffés, le débat commence
C’est comme les pédés, on peut plus dire que c’en est
L’ont tous le sida ces empaffés, j’te les foutrais dans un camp fermé
Et j’parle pas des juifs qui tiennent les rouages du pouvoir
Vichy avait du bon, tiens Francis, resserre-moi donc à boire
Faut pas qu’ je rentre tard, sinon bobonne va aboyer
D’puis qu’elle adhère à Ni Putes Ni Soumises, j’peux même plus l’avoiner
Au bistrot du commerce, on rit bêtement
En faisant toujours le même geste, à l’écœurement
« ‘ttention gosier, v’là une averse ! »
Une remarque en appelle une autre
Pour faire court, tout y passe : des fonctionnaires feignasses
Aux Rmistes, qui dans le luxe se vautrent en rien foutant
J’te leur ferais casser d’la caillasse au bord des routes
Comme je l’ai vu dimanche dernier, dans Walker Texas
C’est c’qui nous faudrait : un gros dur pour nettoyer la place
De tous ces étrangers qui nous volent et nous encrassent
Soudain, quelqu’un entre dans le bistrot sans que personne ne le remarque
Sa voix résonne : « Sali’ ti l’monde ! »
Un ange passe
C’est Ahmed qui, comme tous les jours, vient faire son quinté
C’est bizarre, entre ce type et nous, c’est jamais vraiment passé
Pt ’être parce qu’i boit pas, qu’i fume pas… Dur de sympathiser
Comment dire, il est pas comme nous quoi, y’a rien à ajouter
En plus, faut dire qu’au milieu de nos ventres ronds et de nos teints rougeaux
Difficile d’affirmer qu’i passe bien dans l’ tableau
Celui d’une bande de gars sympas, qui aiment bien rigoler
Et ce, toujours dans un bon esprit, Francis, remets une tournée
|
||||
8. |
Vingt Ans (Léo Ferré)
02:57
|
|||
9. |
Le Même Eclat
05:21
|
|||
Se sentir nu et apeuré
Noyé dans les limbes du doute
Au milieu de l’obscurité, rechercher un semblant d’écoute
Savoir se parer d’insouciance pour pouvoir aller au-delà
D’un sentiment dominant de méfiance, et de chacun pour soi
Tu sors à peine de ta chrysalide que, déjà, tu t’en vas
Tu marques de tes pas cette terre aride
Sans même regarder derrière toi
Sans même comprendre, sans même savoir
Que des êtres semblables dans leur fragilité
Virevoltent et s’émeuvent, tout comme toi
Regarde-moi, comme je te regarde
Ressens la vie qui coule en moi
Ne vois-tu pas
Ne sens-tu pas
Que nous luisons du même éclat
Me taire, et écouter ton écho qui résonne en moi
Pour un instant, sentir qu’on est vivant
Comprendre que ta présence, à ce moment, est importante
Quelque chose de précieux, d’urgent
Donne-moi la main tant qu’il est temps
Ne vois-tu pas qu’il passe, et que bientôt, de nous
Il n’y aura plus de traces
Sentir que tu es mon appui, pour un instant, être celui
Qui partagera avec toi cette seconde, au milieu du néant
Une fraction furtive d’amour et de complicité
Au cœur de cette éternité, pour qui nos vies ne sont qu’un jour
Dans le silence résonne le tic-tac du compte à rebours
Et on avance, aveugle et sourd
Tout seul, on poursuit son errance
Mais, puisqu’un pas dans la vie est un pas vers la mort
Ce pas, je le fais avec toi
Et si les dieux nous jettent un sort
Autant foncer têtes baissées, en ayant l’impression d’être libres
Libres d’exulter, et de suivre le chemin qu’on s’est désigné
Libre d’y croire, et de suivre, pour ne pas être résigné
Comme tous ces gens aigris, qui pensent qu’on ne cesse de reproduire
Pouvoir m’arrêter, et souffler à l’ombre de ton rire
T’accompagner dans tes délires, même s’ils me sont étrangers
Car avec toi, j’éprouverai le temps d’un soupir
L’ivresse et le goût du danger
Déjà, la parenthèse enchantée se referme
On s’aime à en perdre haleine, alors que les secondes s’égrainent
A peine le temps de ressentir
Déjà, la vie nous désunit
Qui de nous deux l’aurait prédit
Inconscients du temps qui s’enfuit
Il nous reste encore un moment
Avant d’être happés dans la course folle d’un monde
Qui se fout bien des sentiments
Mais pour une seconde encore, je veux te garder contre moi
Avant qu’on change de décor
Pouvoir t’étreindre encore une fois
Regarde-moi, comme je te regarde
Ressens la vie qui coule en moi
Ne vois-tu pas
Ne sens-tu pas
Que l’on vibrait du même éclat
|
||||
10. |
Biens Pensants
04:42
|
|||
Ils nous reviennent d’une époque qu’on croyait révolue
Une époque où on savait se tenir en société
Nostalgiques de ces temps obscurs, ils ont jeté leur dévolu
Sur ces tristes années 2000, pour le moins agitées
D’abord indésirables ? Ce sont-ils sournoisement immiscé
Au sein de l’écrasante majorité des anonymes
Ou bien ont-ils toujours été là, tranquillement cachés
Attendant leur heure, convaincus de la revanche ultime
Eh bien nous y voilà ! Ils ont remporté la bataille
Mais une victoire sans gloire, on leur a laissé le champ libre
Ils ont gagné la course, on leur a remis la médaille
Mais désormais, de ces prétentieux bien pensants nous sommes les cibles
Ils pensent qu’ils ont pour eux le bon sens et la morale
Celle qui veut qu’on se taise au lieu de dire ce qu’on ressent
Ces cons terre-à-terre ne contemplent jamais les étoiles
Messieurs dames, faites place à la horde des bien-pensants
Ces hommes et femmes comme vous et moi, donnent leur avis sur tout
Rien n’est trop compliqué pour eux, au contraire, tout est limpide
Garants des bonnes mœurs, pour eux tant de choses sont taboues
La profondeur de leur pensée ne reflète que le vide
Du haut de leur perchoir, ils jugent avec mépris
Les originaux se sentant trop à l’étroit dans les cases
Qui leur ont été attribuées, ces gêneurs n’ont pas la décence
De faire table rase de leur puissant désir de liberté
Liberté de conscience, liberté d’acte et de parole
Liberté de proposition ou de contestation
Mais ces messieurs et dames voudraient qu’on nous enseigne à l’école
La discipline qui consiste à museler ses opinions
Ils pensent qu’ils ont pour eux le bon sens et la morale
Celle qui veut qu’on se taise au lieu de dire ce qu’on ressent
Ces cons terre-à-terre ne contemplent jamais les étoiles
Messieurs dames, faites place à la horde des bien-pensants
Cette époque est la leur, un joli retour en arrière
Improbable pirouette qui nous ramène trente ans plus tôt
Et le bon peuple applaudit leurs discours réactionnaires
Ces mots qui sentent la France, avec un arrière-goût rétro
Mais derrière ces paroles qu’ils clament le regard fier
Se cache une idée de la société bien arrêtée
Soyons entre nous, pour les autres, il reste la prière
Aide-toi et le ciel t’aidera, si tu n’es pas bien né
Eh oui, mesdames messieurs, bienvenus dans la France TF1
Celle des ambitieux, des entrepreneurs et des rentiers
Cette France où grossissent chaque jour les rangs des crève-la-faim
Qui courbent l’échine sous le regard narquois des banquiers
Car rien ne les intéresse tant que leurs propres affaires
Que les petites gens se démerdent, ce ne sont que des perdants
S’ils remuent trop, il reste l’institution pénitentiaire,
Où nous entassons tous ceux que nous trouvons emmerdants
Ils pensent qu’ils ont pour eux le bon sens et la morale
Celle qui veut qu’on se taise au lieu de dire ce qu’on ressent
Ces cons terre-à-terre ne contemplent jamais les étoiles
Messieurs dames, faites place à la horde des bien-pensants
Et lorsque nous aurons fait la lumière sur leurs intentions
Que restera t’il de nous et nos délires utopiques
Qu’ils tiendront depuis si longtemps les rênes de la nation
Aurons-nous la volonté d’un nouveau mai 68
Quand ils auront créé leur société à deux vitesses
En matière d’éducation, de santé ou de travail
De religion, d’immigration, culture ou parité des sexes
Saurons-nous dire basta, avec une énergie sans faille
Je fais le vœu pieu que bientôt sonne l’heure du réveil
Avant que cet état bourgeois ne nous croque à 100%
Mais là je rêve, leurs vieilles combines ne datent pas de la veille
Ça fait des lustres qu’on est cernés par les bien-pensants
Ça fait des lustres qu’on est cernés par les bien-pensants
Ça fait des lustres qu’on est cernés par les bien-pensants
|
||||
11. |
||||
12. |
Ce Jour Là
04:21
|
|||
De ma fenêtre, je regarde tomber la pluie
Ce temps d’hiver me pèse, et dans mon esprit
Tout est gris, comme le ciel au dessus de ma tête
Depuis qu’elle est partie, mes jours ne sont que solitude et ennui
Elle s’en est allée vers d’autres horizons
Elle a emporté loin d’ici les couleurs et les saisons
On se croirait en novembre, pourtant c’est l’été
Le mauvais temps s’est égaré en plein mois de juillet
Il pleut sur la ville, et aussi dans mon cœur
Le bonheur ne tient qu’à un fil, et la marge d’erreur
Était si mince, que le couperet devait tomber tôt ou tard
Son existence a basculé sans crier gare
Le vide s’installe, et je refais le film dans le moindre détail
Et il m’apparaît que notre bataille était perdue d’avance
La chance, insaisissable, n’était pas sur nos rails
Je pense à elle, et à ses désirs d’avenir radieux
Pour elle et sa fille ; cette joie simple d’être en vie
L’espoir m’a quitté un jour d’avril
J’ai mal à la mémoire, et je traîne mon spleen
Le temps s’est arrêté ce jour là
Toutes mes utopies se sont envolées ce jour là
Et depuis, je ne cesse de me demander pourquoi
Elle rêvait de se faire une place ici
D’oublier le passé, et ses souvenirs crasses
Elle m’en avait parlé des nuits et des nuits
C’était sa façon d’exhorter l’angoisse…
Elle m’avait raconté comment elle avait fui cet endroit
Et son chemin de croix pour quitter ce pays
Où elle était née, mais qui la maintenait en esclavage
Où elle ne pouvait même pas montrer son visage
Elle m’avait raconté sa vie de jeune femme
Soumise et dévouée, pour le salut de son âme, soit disant
Jeune mariée à quinze ans
Un rôle qui se borne à élever son enfant
Il en fallut du courage pour s’arracher à son destin
Quitter sa cage
Je n’aurais pas fais le tiers du chemin qu’elle a parcouru
Elle a tout vu de la barbarie des hommes, et ses ravages
Cela faisait désormais sept ans qu’elle vivait ici
C’était mon amie
Elle avait reconstruit sa vie selon ses rêves, qui n’étaient pas si grands
Mais quand t’as connu l’enfer, tout ça représente tellement
Un appartement, un job à plein temps dans un restaurant haut de gamme
Une vie sereine et sans larmes
Jusqu’à ce jour d’avril
Où elle est allée chercher sa fille à l’école
Des messieurs l’attendaient
Le temps s’est arrêté ce jour là
Toutes mes utopies se sont envolées ce jour là
Et depuis, je ne cesse de me demander pourquoi
Pourquoi
|
IRAEVERSIBLE Nancy, France
IRAEVERSIBLE est né en 2007, de la rencontre entre un parolier et quatre musiciens.
Après son premier opus - La Nécessité
d'Etre, 2010, autoproduit - IRAEVERSIBLE poursuit son aventure musicale en vous proposant un nouveau titre par mois, à partir de mars 2012.
... more
Streaming and Download help
If you like IRAEVERSIBLE, you may also like:
Bandcamp Daily your guide to the world of Bandcamp